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11 décembre 2018

 

Les tunnels transalpins, de la route du sel au TGV

par Jean FERAUD et Jean PIRAUD

 

Cette conférence a été présentée par deux anciens spécialistes du BRGM : Jean Féraud, un géologue féru de l'Histoire des Alpes qui nous entrainé dans un voyage dans le passé des liaisons transalpines, et Jean Piraud, ingénieur de génie civil, spécialiste de la construction des tunnels qui a beaucoup travaillé sur les projets actuels de tunnels transalpins, en particulier sur le projet Lyon-Turin.


1ère partie : les voies de communication transalpines, par J. Féraud

Pendant des siècles, les voies de communications transalpines ont été une nécessité vitale pour la Maison de Savoie, qui possédait des territoires à la fois côté France (duché de Savoie, comté de Nice, et de façon plus éphémère la vallée de Barcelonnette) et côté Italie (Piémont et Val d’Aoste, puis Sardaigne et Ligurie). C’est ainsi que la cour de Savoie traversait les Alpes plusieurs fois par an d’abord à dos de mulets, puis en diligences, en transportant ses meubles et ses trésors ! Entre Nice et Coni, ces chemins muletiers étaient aussi utilisés pour le transport du sel débarqué des salines de Provence ; en effet, cet « aliment » essentiel manquait totalement en Italie du Nord ; ce commerce très lucratif a fait la fortune de la vallée de la Roya, qui a pu s’offrir les services d’artistes prestigieux qui y ont laissé des chefs d’œuvre de peinture et d’architecture baroque.

Mais ces chemins étaient bien peu praticables en hiver, et ne facilitaient guère la tâche des « envahisseurs » - qui étaient toujours les Français partant guerroyer en Italie ! - Une première route carrossable a été ouverte en 1806 sous l’ordre de Napoléon par le col du Mont-Cenis : la RN6. Plus tard, quand le roi de Savoie a jugé qu’il n’avait plus rien à craindre de la France, il s’est résolu à construire d’autres voies de grande communication : en 1871 le tunnel ferroviaire du Mont-Cenis, long de 13 km est creusé grâce à une invention révolutionnaire : le marteau perforateur à air comprimé, mis au point par un illustre ingénieur savoyard, Sommeiller. Pour la première fois, de grands trains ont pu franchir les Alpes et relier l’Italie au reste de l’Europe en toutes saisons. En 1882, ce fut le tour du tunnel routier du col de Tende, puis en 1898 le tunnel ferroviaire de Tende. Pour la petite histoire, un premier tunnel muletier, celui de la Traversette, avait été creusé à la barre à mine en 1480 (sic) entre la haute vallée du Queyras et l’Italie, à l’altitude de 2900 m ! On voit que ces ouvrages transalpins, et bien d’autres qui nous ont été présentés, ont battu en leur temps tous les records du Monde.

  J&J  

 2ème partie : techniques de creusement des tunnels, par J. Piraud

Les TGV France-Italie passent depuis les années 1980 dans le vieux tunnel du Mont-Cenis, mais ils devraient relier Paris à Turin en 4 heures vers 2030 quand le nouveau tunnel, dit « Tunnel de base du Mont-Cenis », sera achevé ; le creusement de cet ouvrage colossal, long de 57 km, vient de commencer entre Modane et Suse (Piémont), pour un coût total estimé à près de 10 milliards d’euros… Heureusement, l’Union européenne considère qu’il s’agit là d’une liaison essentielle et a promis de régler 40 % de la facture ! C’est pourquoi la 2ème partie de la conférence a été consacrée aux diverses techniques de construction des tunnels, aux difficultés que l’on rencontre lorsqu’on travaille à 2500 m sous des montagnes et aux manières de les surmonter. Selon les terrains à creuser, deux méthodes très différentes peuvent être employées :

- D’une part la méthode traditionnelle, avec ses séquences répétées d’excavation à l’explosif, puis d’évacuation des déblais et enfin de soutènement des parois mises à nu par du béton projeté et des boulons d’ancrage ;

- D’autre part la méthode du tunnelier, entièrement mécanisée. Ces machines, qui sont d’énormes perceuses rotatives, représentent un très gros investissement initial, qui ne peut être amorti que sur de grandes longueurs ; mais elles ont l’avantage d’aller 5 à 10 fois plus vite et surtout elles exposent moins les ouvriers aux dangers de la montagne.

Tous les tunneliers sont spécifiques et conçus pour un type de terrain particulier, car ils doivent faire face en profondeur à des difficultés très variables : risques de venues d’eau sous pression pouvant noyer le chantier, roches très abrasives ralentissant la progression, pressions excessives tendant à refermer le tunnel, cavités karstiques à combler avant de pouvoir les franchir, grisou, amiante, etc. Mais ces difficultés sont aujourd’hui bien maîtrisées, pourvu qu’elles aient été identifiées à l’avance. Le BRGM a été depuis 1990 l’un des acteurs principaux des travaux de reconnaissance et des chantiers d’essai qui ont été entrepris dans la vallée de la Maurienne pour mettre au point ce grand projet.

 

 

Vous pouvez écouter (et voir) la conférence en suivant les liens ci-dessous.
 
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