Année 2008-2009 : 17 février 2009

Les grands transatlantiques italiens,

par Jean Paul MAUGIS

En  avant propos, le conférencier explique le choix du thème de cette soirée qui pourrait  paraître inhabituel compte tenu des sujets traités précédemment, par un certain atavisme, ayant eu dans sa famille quelques navigateurs et ayant lui-même eu l’occasion de parcourir les mers.

L’histoire des transatlantiques italiens commence au début du 20e siècle, alors que depuis la seconde moitié du 19e siècle tous les navires les plus prestigieux en service sur l’Atlantique étaient anglais ou allemand, notamment la North German Lloyd qui avait construit en quelques années ses deux plus grands et rapides navires de son histoire : le Bremen et l’Europa ; en service sur la route de l’Atlantique Nord, ils étaient une véritable vitrine internationale pour la nation qui les possédait.

Elle correspond avec la période de forte émigration européenne vers le Nouveau Continent, en particulier italienne — sur la période 1857-1920 et vers la seule Argentine : 2 341 000 italiens — et la naissance d’un flux touristique américain vers l’Europe.

C’est alors que l’Italie décide de se doter d’un couple de grands et prestigieux transatlantiques pour entrer en compétition sur l’Atlantique en procédant, au préalable, au regroupement des trois principales compagnies de navigation : NGI (Navigazione Generale Italiana), Lloyd Sabaudo,Cosulich line pour former la Cie Italia di Navigazione ; ces navires furent le “Rex” et le “Conte di Savoia”.

Avant la deuxième  guerre mondiale

Toutefois ils avaient été précédés, dans les années 1907-1908, par la construction des premiers navires de passagers aux chantiers navals di Riva Trigoso (Genova) pour le compte de la Lloyd Italiano, des jumeaux :

Cie Lloyd SabaudoDeux navires furent ensuite construits aux chantiers navals W.Beardmore &Co.Ltd. de Dalmuir –Glasgow- pour le compte de la Cie Lloyd Sabaudo :

Les navires italiens se distinguaient alors par leur design et le goût de leurs aménagements intérieurs — deux navires construits en 1924 et 1926 aux chantiers navals Triestrino di Monfalcone pour la Cie Cosulich Line le”Saturnia” et le “Vulcania” représentaient un changement dans l’architecture (une seule cheminée particulièrement basse) et dans l’aménagement, passant d’un style “Liberty” à un goût plus rationnel et moderne; ils furent tous deux mis en service sur les lignes de l’Amérique du Sud et de New York .

Construit également en 1926 par les chantiers Ansaldo & Co di Sestri Ponente le”Roma” fut le plus grand navire réalisé jusqu’alors en Italie : 32583 tonneaux, longueur 232 m, 1675 passagers, le premier à être doté d’une piscine, il fut décrit comme un monument de la mer : plus long que San Pietro, plus large que le Pont du Rialto, et plus haut que la Tour de Pise :

Avec des caractéristiques proches, son sister-ship “ l’Augustus”était considéré comme le plus grand au Monde, aucun navire ne développait alors une puissance de 28000 cv :

Dernier navire italien construit à l’étranger (Dalmuir-Glasgow) pour la Cie Lloyd Sabaudo et lançé le 23 avril 1925, le “Conte Biancamano” (Humbert I de Savoie-conte d’Aoste) assure la ligne Gênes – New York :

Il eut également un sister-ship le “Conte Grande” au sort analogue : capturé au Brésil et incorporé à l’US Navy en 1942, restitué à l’Italie et retiré du service en 1961.

       Construit à Gênes en 1931, baptisé par le roi Vittorio Emanuele III et lancé le 1er août 1931 le “Rex” fût le plus grand navire de la Cie.Navigazione Generale Italiana :

Il reste le plus légendaire des transatlantiques italiens rendu immortel par Fellini dans le film “Amarcord”.

Lancé le 28-10-1931 par les chantiers réunis de l’Adriatique en présence de la princesse Maria José de Belgique, par la suite reine d’Italie, le”Conte di Savoia”, sister-ship du Rex, fit son voyage inaugural le 30 novembre 1932 de Gênes à New York;

Après la deuxième guerre mondiale

L’armistice avec les Alliés ne fut d’aucune aide pour les navires italiens dès lors que les allemands commencèrent à occuper l’Italie ; en fait ils furent soit bombardés par les Alliés, soit coulés par les allemands ; ainsi l’Italie perdit 31 de ses 37 navires passagers.

À la fin de 1946 le nouveau flux migratoire vers l’Amérique du Sud offre de nouvelles perspectives au transport de passagers.

Ainsi, en éxécution du programme de reconstitution de cette flotte, est construit aux chantiers San Marco de Trieste le “Giulio Cesare” en 1951. Son aspect extérieur le distinguait sensiblement des navires construits jusqu’alors : proue élancée, poupe arrondie, superstructures en dégradé vers la poupe, une cheminée légèrement aérodynamique. Son aménagement intérieur reflétait le bon goût et l’élégance italien donnant l’impression aux 1102 passagers de vacances dans une auberge de luxe.

Il bénéficiait des instruments de navigation les plus complets et les plus modernes : radar, compas gyroscopique, pilote automatique, etc.

Navire de la SIN du groupe Finmare ou Società Italia (Italian Line), l’“Andrea Doria” (amiral ligure 1466-1560) entre en service le 14 janvier 1953 (1241 passagers sur 10 ponts) il n’était ni le plus grand, ni le plus rapide — cette primauté revenait alors aux navires anglais “ RMS Queen Elisabeth” et américain “United States” — en revanche, il était le plus luxueux : 3 piscines ouvertes (une par classe) ;Andrea Doria

La construction du transatlantique “Leonardo da Vinci” commença en 1958 aux chantiers Ansaldo di Genova opportunément pour remplacer la perte de l’Andrea Doria” :

Galileo GalileiAu cours de l’année 1963 deux unités furent construites pour la Cie Lloyd Triestino aux carastéristiques similaires : silhouette élégante de la coque et des superstructures, cheminée élégante et fonctionnelle (élimination de la retombée des résidus de combustion sur les ponts), à l’intérieur places et espace limité pour la 1re classe par rapport à la classe Touristes ; ils furent les plus grands navires passagers de cette Compagnie utilisés sur les lignes de la Méditérranée et de l’Australie-Extrême Orient.

le “Galileo Galilei”

Son sister-ship le ”Guglielmo Marconi” :

Néanmoins les Compagnies maritimes italiennes tentèrent de contrer ce déclin en réalisant des unités encore plus imposantes, rapides et fastueuses. Ainsi furent réalisées celles qui seront appelées les deux “cathédrales de la mer”.

MichelangeloTout d’abord le “Michelangelo” : 45900 tonneaux, L.275m, 1775 passagers, équipage 725 hommes, coût 75 milliards de lires.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                   

RaffaelloEnsuite fut mis en service, le 25 juillet 1965 entre Gênes et New York avec 1121 passagers à bord, le “Raffaello” aux caractéristiques techniques similaires :

Au fil des années il apparut clairement que l’époque des transatlantiques était passée :

Les navires italiens furent confrontés aux mêmes difficultées et il leur fallut faire appel à l’aide du Gouvernement qui accepta de subventionner la gestion des navires.

En 1977, l’Italie ferme définitivement ses lignes transatlantiques et se consacre désormais aux croisières, domaine oû elle occupe une place prépondérante.

 

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